L'affûtage est parfois une question épineuse à quelques jours d'une épreuve.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Je vais te fournir un cadre assez simple à mettre en place et issu de la littérature scientifique. Puis je te montre comment j'ai adapté cette structure pour la préparation Maxi Race de l'un des mes athlètes.
Et si on parlait de plusieurs affûtages distincts ?
Lors de cette période, tu cherches à maximiser ta forme. Donc tu veux conserver le plus haut niveau de progrès physiques (fitness) tout en diminuant ta fatigue.
Forme = Fitness - Fatigue
Donc tu dois diminuer la charge, assez pour bien réduire ta fatigue, et.... pas trop pour conserver un bon niveau de fitness.
Par exemple, comment peux-tu conserver un bon niveau de fitness dans le domaine de la force excentrique (clé pour bien descendre en trail), tout en ayant des cuisses opérationnelles le jour J (faible de niveau de fatigue) ? Certainement en travaillant ce secteur, en faisant des rappels, puis en arrêtant de le stimuler de manière conséquente trois semaines avant la course par exemple.
J'aime souvent rappeler que la performance en trail et en course à pied et modélisable ainsi:
Performance = (VO2Max x (% de VO2Max)) / Economie de course
L'objectif de l'affutage est d'optimiser ces paramètres, et notamment le versant économie de course.
De manière analogue au niveau de force excentrique, nous pourrions nous demander comment optimiser le niveau de force maximale concentrique, le niveau d'efficacité du système digestif, le niveau de disponibilité mentale, etc.
La performance est la combinaisons de systèmes, certes imbriqués, mais chacun mérite une période d'affûtage qui lui est propre.
Que dit la science ?
Je vais m'appuyer sur la méta-analyse de Bosquet et al., qui fait référence sur cette question.
Les auteurs préconisent:
- un affûtage progressif
- avec une diminution de la charge d’entrainement allant de -60% à -40% de la charge observée à trois semaines de l’épreuve.
- La fréquence d’entrainement et la distribution des intensités doivent rester les mêmes. Seule la charge diminue.
Etude de cas d'un athlète ayant préparé la Maxi-Race
Un peu de contexte. Ce traileur a terminé la Maxi Race aux environs de la 350ème place. Il a réalisé un dernier bloc d’entrainement (week-end choc) de deux fois 7h afin de reconnaître le parcours à trois semaines de l’évènement.
J’ai fait le choix de conserver à S-3 (3 semaines de la course) 60% de la charge d’entrainement de S-5. Je n’ai pas pris S-4 comme référentiel. C’est une semaine particulière car elle inclut deux longues sorties de sept heures. La charge en S-2 est 40% de celle observée en S-5.
Durant la dernière semaine, on ajuste les séances selon le ressenti au réveil et durant les séances
Les recommandations issues de la littérature mentionnent de conserver entre 60% et 40% de la charge de S-3 en S-2 et S-1. J’ai fait le choix d’anticiper un peu afin de bien digérer les 14 heures réalisées en deux jours.
La distribution des intensités (voir ci-dessous)* nous montre qu’elle est pratiquement la même de S-5 à S-2 malgré l’affûtage. J’ai conservé des séances en côte au dessus du second seuil ainsi que des efforts entre le seuil 1 et le seuil 2, jusqu’à 5 jours avant la course.
* Premier graphique, Temps passé dans chaque zone d'entrainement
* Second graphique, pourcentage du temps passé dans chaque zone, période pré-affutage versus période post-affutage.
Ceci étant dit, voici ce que montrent les marqueurs de récupération que sont le sommeil, la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC) et la fréquence cardiaque au repos lors des dernières semaines d'entrainement.
La moyenne glissante sur 7 jours de la VFC est en hausse après une chute à la suite du week-end choc. Son niveau basal est de 60, elle est descendue à 53 en lendemain de week-end choc puis elle est remontée à 70 juste avant l’épreuve. Exception faite du matin de la course; avec un départ aux alentours de 3h du matin, la nuit fut très courte.
Le niveau basal de FC de repos est de 42bpm, avec un pic à 50bpm en sortie de week-end choc puis un retour autour de 40bpm en veille de course.
En terme de ressenti de l’effort, aucun effort n’est perçu comme étant très difficile durant les dernières semaines, et les retours écrits de l’athlète sont positifs: “Je me sens bien”.
La quantité de sommeil est, elle, restée la même.
La hausse de la VFC, couplée à une baisse de la fréquence cardiaque de repos ainsi qu’une sensation de forme observée par l’athlète sont autant de marqueurs d’un affutage potentiellement réussit.
Bonne semaine et à bientôt !
Maxime